Pierre l'enchanteur
Il se dit "elficologue", spécialiste des elfes et autres espèces légendaires. Un pied de nez aux esprits rationnels qui tentent de mettre l'imaginaire au carré. Pierre Dubois, écrivain, scénariste, conteur, est en tout cas un enchanteur. Il vit dans les Ardennes, dans une maison magique qui déborde de grimoires et d'objets hétéroclites, et écrit des chefs-d'oeuvre d'humour et d'érudition: Les Contes du petit peuple, Les Contes de féerie, ou encore La Grande Encyclopédie des fées, La Grande Encyclopédie des lutins (éd. Hoëbeke). Vingt ans de recherches pour répertorier une centaine d'espèces! Il s'attaque maintenant aux elfes. On sait que les fées lui donneront longue vie.
Vous écrivez des contes de fées, vous collectez les légendes d'antan, vous répertoriez les sorcières, les elfes et les lutins dans des encyclopédies illustrées... A l'heure d'Internet et des missiles Tomahawk, parler de princes, de princesses et de quenouilles, c'est quand même un peu désuet, non?
"Il était une fois", cela ne signifie pas "autrefois". Mais "Il était une fois le rêve", "Il était une fois l'imaginaire". Le monde imaginaire n'est pas installé au Moyen Age. Il est intemporel et universel. Baba Yaga, l'ogresse des steppes russes, ressemble à Gaelhec-Bheur en Irlande; partout, on retrouve les mêmes lutins, les mêmes fées; et il y a, dans tous les pays, des Petits Chaperons rouges, des loups, des elfes et des sirènes. Quelle que soit sa forme, sa localisation, son époque, le conte prend sa source aux mêmes mythes, aux mêmes archétypes... Il n'est autre que le jardin de notre imaginaire, dont les racines sont plantées dans la nuit des temps.
"Il était une fois", cela ne signifie pas "autrefois". Mais "Il était une fois le rêve", "Il était une fois l'imaginaire". Le monde imaginaire n'est pas installé au Moyen Age. Il est intemporel et universel. Baba Yaga, l'ogresse des steppes russes, ressemble à Gaelhec-Bheur en Irlande; partout, on retrouve les mêmes lutins, les mêmes fées; et il y a, dans tous les pays, des Petits Chaperons rouges, des loups, des elfes et des sirènes. Quelle que soit sa forme, sa localisation, son époque, le conte prend sa source aux mêmes mythes, aux mêmes archétypes... Il n'est autre que le jardin de notre imaginaire, dont les racines sont plantées dans la nuit des temps.
Une forme de mémoire collective?
Absolument. Les personnages légendaires sont des métaphores qui renvoient à une culture inconsciente, commune à l'humanité, même si elle se pare des différents folklores et des coutumes. Le conte est né aux premiers bivouacs, aux premières veillées... Peut-être était-ce le début d'une prière, quelques formules magiques pour conjurer une peur? Peut-être un petit d'homme, assis seul sur un tertre, a-t-il rêvé pour la première fois à des royaumes enchantés? C'était le temps où les hommes étaient confrontés à l'immensité, à la beauté des choses, à la peur de l'obscurité. Un temps où on parlait avec les bêtes, où on faisait alliance avec elles pour tenter de se concilier la nature. C'est le premier imaginaire des peuples. Et c'est toujours le premier imaginaire de l'enfant.
Absolument. Les personnages légendaires sont des métaphores qui renvoient à une culture inconsciente, commune à l'humanité, même si elle se pare des différents folklores et des coutumes. Le conte est né aux premiers bivouacs, aux premières veillées... Peut-être était-ce le début d'une prière, quelques formules magiques pour conjurer une peur? Peut-être un petit d'homme, assis seul sur un tertre, a-t-il rêvé pour la première fois à des royaumes enchantés? C'était le temps où les hommes étaient confrontés à l'immensité, à la beauté des choses, à la peur de l'obscurité. Un temps où on parlait avec les bêtes, où on faisait alliance avec elles pour tenter de se concilier la nature. C'est le premier imaginaire des peuples. Et c'est toujours le premier imaginaire de l'enfant.
Qui le redécouvrirait alors spontanément?
Comme les premiers hommes, chaque enfant retrouve cette pensée sauvage des premiers temps. Lui aussi, il a peur du noir. Alors, la nuit, il n'ose pas mettre le pied hors du lit de peur que la Cauchemarde - ou le Boggey Man - ne le happe; il se donne des petits rituels, des petites croyances semblables à celles qu'on avait trouvées jadis pour exorciser ses craintes. Le conte de fées lui donne les lois de l'imaginaire, il le guide sur des chemins initiatiques pour l'aider à une meilleure connaissance de lui-même, à une harmonie avec les autres et avec le monde.
Comme les premiers hommes, chaque enfant retrouve cette pensée sauvage des premiers temps. Lui aussi, il a peur du noir. Alors, la nuit, il n'ose pas mettre le pied hors du lit de peur que la Cauchemarde - ou le Boggey Man - ne le happe; il se donne des petits rituels, des petites croyances semblables à celles qu'on avait trouvées jadis pour exorciser ses craintes. Le conte de fées lui donne les lois de l'imaginaire, il le guide sur des chemins initiatiques pour l'aider à une meilleure connaissance de lui-même, à une harmonie avec les autres et avec le monde.
Votre petit peuple de fées, lutins, gnomes, trolls, tomtes, ondines et sorcières de tous horizons constituerait la mythologie des origines, antérieure à celle de l'Antiquité?
Oui. A côté des grandes mythologies, ces dieux du Panthéon et de l'Olympe avec qui seuls les prêtres et les savants pouvaient dialoguer, les hommes se sont donné naguère des esprits plus proches d'eux, plus accessibles, plus familiers. Ces derniers aidaient à obtenir une bonne récolte, à éviter que le fleuve ne déborde, à trouver une harmonie avec la nature. Regardez par exemple toutes ces belles endormies des légendes: la Belle au bois dormant, Blanche-Neige enfermée dans son cercueil de verre, le Petit Chaperon rouge qui connaît lui aussi la nuit... Elles symbolisent toutes la nature qui s'endort, prise par la glace et la montée des ténèbres, puis qui renaît avec le mythe solaire du beau prince qui apporte la vie ou l'aurore du Chaperon rouge... Elles racontent l'hiver et le printemps. Traditionnellement, au mois de mai, on célébrait les épousailles de toutes ces belles qui s'éveillaient avec le blanchiment des haies. Bien sûr, autrefois, on n'interprétait pas les contes. On les vivait, on en avait une connaissance intuitive.
Oui. A côté des grandes mythologies, ces dieux du Panthéon et de l'Olympe avec qui seuls les prêtres et les savants pouvaient dialoguer, les hommes se sont donné naguère des esprits plus proches d'eux, plus accessibles, plus familiers. Ces derniers aidaient à obtenir une bonne récolte, à éviter que le fleuve ne déborde, à trouver une harmonie avec la nature. Regardez par exemple toutes ces belles endormies des légendes: la Belle au bois dormant, Blanche-Neige enfermée dans son cercueil de verre, le Petit Chaperon rouge qui connaît lui aussi la nuit... Elles symbolisent toutes la nature qui s'endort, prise par la glace et la montée des ténèbres, puis qui renaît avec le mythe solaire du beau prince qui apporte la vie ou l'aurore du Chaperon rouge... Elles racontent l'hiver et le printemps. Traditionnellement, au mois de mai, on célébrait les épousailles de toutes ces belles qui s'éveillaient avec le blanchiment des haies. Bien sûr, autrefois, on n'interprétait pas les contes. On les vivait, on en avait une connaissance intuitive.
Les contes de Noël peuvent-ils être perçus de la même manière?
Bien sûr! Noël, c'est le moment où les jours reprennent le pas sur les nuits. C'est le retour de la lumière, le réveil de la nature. Autrefois, on allumait une grande bûche, pour célébrer cette renaissance, et on mettait dans la maison les branches perpétuelles: le houx, le gui, le sapin, pour représenter la vie éternelle. D'où les couleurs rouge et vert de Noël. Il ne faut pas oublier que c'est une fête païenne, pastorale. Le christianisme n'a fait que s'y greffer en déplaçant artificiellement la date de la naissance de Jésus.
Bien sûr! Noël, c'est le moment où les jours reprennent le pas sur les nuits. C'est le retour de la lumière, le réveil de la nature. Autrefois, on allumait une grande bûche, pour célébrer cette renaissance, et on mettait dans la maison les branches perpétuelles: le houx, le gui, le sapin, pour représenter la vie éternelle. D'où les couleurs rouge et vert de Noël. Il ne faut pas oublier que c'est une fête païenne, pastorale. Le christianisme n'a fait que s'y greffer en déplaçant artificiellement la date de la naissance de Jésus.
Vous croyez encore au Père Noël?
Je crois à l'esprit de Noël. Santa Claus, c'est le géant rouge, le dieu solaire païen, qui représente la force. Dans de nombreux pays, il est accompagné par un aréopage de lutins et de fées qui viennent apporter les cadeaux. Le Père Noël est le personnage céleste des vieilles traditions, c'est Mercure qui parcourt l'espace avec son attelage de rennes. Noël, c'est la nuit de toutes les merveilles, le moment où les frontières s'abolissent entre le monde réel et l'irréel, quand les fées, les esprits peuvent rentrer dans le monde des vivants, et ceux-ci passer aussi de l'autre côté. Souvenez-vous du notaire Scrooge de Dickens: il compte ses sous, il est enfermé entre ses quatre murs. Alors apparaissent les trois fantômes de Noël qui viennent lui rappeler son enfance, tout ce qu'il aurait dû faire s'il avait suivi le vrai chemin de l'étoile. C'est cela, Noël: la fête de l'imaginaire, le retour à la fraîcheur première, au rayonnement, à l'innocence.
Je crois à l'esprit de Noël. Santa Claus, c'est le géant rouge, le dieu solaire païen, qui représente la force. Dans de nombreux pays, il est accompagné par un aréopage de lutins et de fées qui viennent apporter les cadeaux. Le Père Noël est le personnage céleste des vieilles traditions, c'est Mercure qui parcourt l'espace avec son attelage de rennes. Noël, c'est la nuit de toutes les merveilles, le moment où les frontières s'abolissent entre le monde réel et l'irréel, quand les fées, les esprits peuvent rentrer dans le monde des vivants, et ceux-ci passer aussi de l'autre côté. Souvenez-vous du notaire Scrooge de Dickens: il compte ses sous, il est enfermé entre ses quatre murs. Alors apparaissent les trois fantômes de Noël qui viennent lui rappeler son enfance, tout ce qu'il aurait dû faire s'il avait suivi le vrai chemin de l'étoile. C'est cela, Noël: la fête de l'imaginaire, le retour à la fraîcheur première, au rayonnement, à l'innocence.
Et vous, comment l'avez-vous gardée, cette innocence? Les bonnes fées se sont penchées sur votre berceau quand vous étiez bébé?
Je me suis fais leur allié. Enfant, j'aimais ces longs jeudis d'ennui où le regard se perd à travers la vitre et transforme le jardin en monde magique. Je me souviens d'une buanderie, dans ma maison du Nord. C'est un jour de pluie. Je suis enfoui sous un édredon, près du poêle à charbon, digérant une fin de rougeole près d'une pile d'illustrés: Zig et Puce, Robin des bois, Tarzan, Le Fantôme du Bengale... Le tricorne de Long John Silver, un chapeau défraîchi de ma mère dont les bords sont maintenus relevés par des épingles de sûreté, a roulé sous une chaise. Ils sont là, mes compagnons, je les sens, je les vois. Les elfes du crépuscule volent en bande au-dessus des arbres du jardin, le petit peuple des caves pousse le carrelage pour tenter de s'échapper, et sur les vitres ruissellent des méandres et des vagues qui racontent des histoires d'ondines, de vaisseaux fantômes et de sirènes amoureuses... J'ai appris à lire dans les contes. Mais, à l'époque, le livre restait tabou: "Tu n'as pas mieux à faire?" me disait-on. Et à l'école, on a mis des zéros: "Trop d'imagination!"
Je me suis fais leur allié. Enfant, j'aimais ces longs jeudis d'ennui où le regard se perd à travers la vitre et transforme le jardin en monde magique. Je me souviens d'une buanderie, dans ma maison du Nord. C'est un jour de pluie. Je suis enfoui sous un édredon, près du poêle à charbon, digérant une fin de rougeole près d'une pile d'illustrés: Zig et Puce, Robin des bois, Tarzan, Le Fantôme du Bengale... Le tricorne de Long John Silver, un chapeau défraîchi de ma mère dont les bords sont maintenus relevés par des épingles de sûreté, a roulé sous une chaise. Ils sont là, mes compagnons, je les sens, je les vois. Les elfes du crépuscule volent en bande au-dessus des arbres du jardin, le petit peuple des caves pousse le carrelage pour tenter de s'échapper, et sur les vitres ruissellent des méandres et des vagues qui racontent des histoires d'ondines, de vaisseaux fantômes et de sirènes amoureuses... J'ai appris à lire dans les contes. Mais, à l'époque, le livre restait tabou: "Tu n'as pas mieux à faire?" me disait-on. Et à l'école, on a mis des zéros: "Trop d'imagination!"
D'habitude, on lit les contes quand on est petit et puis on les oublie.
J'ai compris qu'on connaissait mal ce monde féerique, qu'il n'était pas uniquement destiné aux enfants, qu'il représentait un art populaire, une vraie culture, une philosophie, et même, comme Bruno Bettelheim l'a montré, un inconscient. Et que tout cela était méprisé. J'ai été très touché par un film de Henry Levin, Le Monde merveilleux des frères Grimm. Dans la forêt, l'un des frères rencontre des vieilles femmes et se sent obligé de transcrire les histoires qu'elles lui racontent. Il ne sait pas pourquoi, mais il doit le faire. Plus tard, quand il se retrouve sur son lit de malade, tous les petits personnages, Blanche-Neige, les géants, les fées viennent le voir et lui disent: "Ne meurs pas, ne meurs pas! Si tu meurs, nous mourrons aussi!" Cette image m'a obsédé. Moi aussi, je me suis senti obligé... On peut y voir une naïveté d'enfance ou une attitude de repli. Mais non, c'est un choix. Et ce n'est pas si facile d'être "elficologue".
J'ai compris qu'on connaissait mal ce monde féerique, qu'il n'était pas uniquement destiné aux enfants, qu'il représentait un art populaire, une vraie culture, une philosophie, et même, comme Bruno Bettelheim l'a montré, un inconscient. Et que tout cela était méprisé. J'ai été très touché par un film de Henry Levin, Le Monde merveilleux des frères Grimm. Dans la forêt, l'un des frères rencontre des vieilles femmes et se sent obligé de transcrire les histoires qu'elles lui racontent. Il ne sait pas pourquoi, mais il doit le faire. Plus tard, quand il se retrouve sur son lit de malade, tous les petits personnages, Blanche-Neige, les géants, les fées viennent le voir et lui disent: "Ne meurs pas, ne meurs pas! Si tu meurs, nous mourrons aussi!" Cette image m'a obsédé. Moi aussi, je me suis senti obligé... On peut y voir une naïveté d'enfance ou une attitude de repli. Mais non, c'est un choix. Et ce n'est pas si facile d'être "elficologue".
Et pourquoi donc?
Parce que l'on avance à contre-courant. Le conte ne dit pas: "Suivez cette route droite pour devenir roi." Mais plutôt: "Empruntez le layon, suivez le sentier détourné, et vous épouserez la belle." Le conte est profondément subversif. D'ailleurs, dans les légendes, les rois ne sont pas bons. Prenez l'histoire des trois frères. Dans la forêt, les deux premiers, les chevaliers, les héritiers rejettent la vieille dame qu'ils croisent, méprisent l'animal blessé et échouent au bout du chemin. Le troisième, lui, l'innocent, l'enfant, avance avec modestie, tente de se concilier les esprits et il réussit. Tel est le message: si on se rend en agresseur dans la forêt, elle s'assombrit, se hérisse, oppose ses épines, ses ronces... Mais, si on va y chercher la paix, la nature se révèle bienfaitrice, et on rencontre non plus la sorcière, mais une "belle à nulle autre pareille", avec sa chevelure de lierre, ses yeux limpides comme la source et son parfum de fleurs...
Parce que l'on avance à contre-courant. Le conte ne dit pas: "Suivez cette route droite pour devenir roi." Mais plutôt: "Empruntez le layon, suivez le sentier détourné, et vous épouserez la belle." Le conte est profondément subversif. D'ailleurs, dans les légendes, les rois ne sont pas bons. Prenez l'histoire des trois frères. Dans la forêt, les deux premiers, les chevaliers, les héritiers rejettent la vieille dame qu'ils croisent, méprisent l'animal blessé et échouent au bout du chemin. Le troisième, lui, l'innocent, l'enfant, avance avec modestie, tente de se concilier les esprits et il réussit. Tel est le message: si on se rend en agresseur dans la forêt, elle s'assombrit, se hérisse, oppose ses épines, ses ronces... Mais, si on va y chercher la paix, la nature se révèle bienfaitrice, et on rencontre non plus la sorcière, mais une "belle à nulle autre pareille", avec sa chevelure de lierre, ses yeux limpides comme la source et son parfum de fleurs...
Dans un conte, tout est métaphore?
Bien sûr! La forêt, c'est l'endroit où l'on trouve ce que l'on a en soi, c'est la vie. Le conte n'est jamais que le miroir de nous-mêmes. Plus le conte est brut, plus il est déchiffrable. Un peu comme les peintures de Lascaux, il a un sens premier. Au fil des époques, on a voulu le lui ôter, on l'a chargé du poids de la société. Au XIXe siècle, Perrault comme Grimm ont transformé les vieilles légendes en histoires de boudoir, avec dames patronnesses, ligues de vertu, et fées moralistes et empesées.
Bien sûr! La forêt, c'est l'endroit où l'on trouve ce que l'on a en soi, c'est la vie. Le conte n'est jamais que le miroir de nous-mêmes. Plus le conte est brut, plus il est déchiffrable. Un peu comme les peintures de Lascaux, il a un sens premier. Au fil des époques, on a voulu le lui ôter, on l'a chargé du poids de la société. Au XIXe siècle, Perrault comme Grimm ont transformé les vieilles légendes en histoires de boudoir, avec dames patronnesses, ligues de vertu, et fées moralistes et empesées.
Mais il y a toujours une morale dans un conte.
Ce n'est pas son but. Le conte de fées n'a rien à voir avec le bien et le mal. Je n'aime pas ces faux contes moraux dispensés par les animateurs socioculturels d'aujourd'hui. Ni ces histoires à sabots de sous-Tolkien qui font l'apologie du "joli temps passé" et s'apparentent souvent à un folklore nationaliste et étriqué. On a voulu enfermer le conte, le faire taire. C'est encore Perrault et ses instits du début du siècle qui ont écrit la pantoufle de vair de Cendrillon. Comme si elle était en charentaises! Mais non! C'est bien la pantoufle de verre, les souliers magiques et transparents qui permettent de traverser l'espace. Les instituteurs ont traqué les fées, ils ont voulu imposer leur norme et leur rationalisme, tuer l'imagination... Non! Ne pas croire aux fées, c'est ne pas croire en soi-même!
Ce n'est pas son but. Le conte de fées n'a rien à voir avec le bien et le mal. Je n'aime pas ces faux contes moraux dispensés par les animateurs socioculturels d'aujourd'hui. Ni ces histoires à sabots de sous-Tolkien qui font l'apologie du "joli temps passé" et s'apparentent souvent à un folklore nationaliste et étriqué. On a voulu enfermer le conte, le faire taire. C'est encore Perrault et ses instits du début du siècle qui ont écrit la pantoufle de vair de Cendrillon. Comme si elle était en charentaises! Mais non! C'est bien la pantoufle de verre, les souliers magiques et transparents qui permettent de traverser l'espace. Les instituteurs ont traqué les fées, ils ont voulu imposer leur norme et leur rationalisme, tuer l'imagination... Non! Ne pas croire aux fées, c'est ne pas croire en soi-même!
Avouez que les fées ont bien changé avec Hollywood et la télé...
Peu importe, pourvu que le sens du conte soit sauvegardé. Qu'est-ce que La Guerre des étoiles, si ce n'est le mythe arthurien transposé dans l'espace? Les enfants qui pratiquent un jeu de rôle font ce que leurs grands-pères faisaient avec des épées de bois et des couvercles de poubelle. Ils ont la même émotion. Mais, dans trop de films, il ne reste plus que le folklore, les effets spéciaux, le décor. Un ridicule Robin Williams en short dans Hook ou un Kevin Costner en Robin des bois de pacotille. Robin des bois ne se bat pas pour Richard, voyons, mais pour l'esprit de révolte, pour la magie, pour le merveilleux!
Peu importe, pourvu que le sens du conte soit sauvegardé. Qu'est-ce que La Guerre des étoiles, si ce n'est le mythe arthurien transposé dans l'espace? Les enfants qui pratiquent un jeu de rôle font ce que leurs grands-pères faisaient avec des épées de bois et des couvercles de poubelle. Ils ont la même émotion. Mais, dans trop de films, il ne reste plus que le folklore, les effets spéciaux, le décor. Un ridicule Robin Williams en short dans Hook ou un Kevin Costner en Robin des bois de pacotille. Robin des bois ne se bat pas pour Richard, voyons, mais pour l'esprit de révolte, pour la magie, pour le merveilleux!
Il y aurait une conspiration contre l'imaginaire?
On le normalise, on le bride, on lui donne des assurances tout risque. Pour monter dans la Lune, Cyrano devrait maintenant s'inscrire à la Sécu, et Long John Silver trouver un sponsor pour s'aventurer sur l'océan. Quant à Alice, elle ne pourrait plus passer le miroir sans l'autorisation des parents, et un miroir homologué "miroir que l'on peut traverser". Tout cela m'effraie! Cette part de merveilleux qui est en nous, on veut toujours nous la couper. L'école la première.
On le normalise, on le bride, on lui donne des assurances tout risque. Pour monter dans la Lune, Cyrano devrait maintenant s'inscrire à la Sécu, et Long John Silver trouver un sponsor pour s'aventurer sur l'océan. Quant à Alice, elle ne pourrait plus passer le miroir sans l'autorisation des parents, et un miroir homologué "miroir que l'on peut traverser". Tout cela m'effraie! Cette part de merveilleux qui est en nous, on veut toujours nous la couper. L'école la première.
Pas toujours. On vient de réinventer Halloween.
Et c'est très bien! Même si l'intention est commerciale, au moins, on renoue avec une tradition, avec une fête des morts. Car le royaume des fées, c'est aussi le royaume des morts, de l'éternelle beauté, le royaume souterrain... Mais regardez nos cimetières: ce sont des parkings! Les tombes ressemblent à des carrosseries de voiture, toutes alignées. Je ne veux pas voir une seule herbe! Quelle tristesse... Oui, il faut retrouver ces petites fêtes, ce sont nos parts d'imaginaire.
Et c'est très bien! Même si l'intention est commerciale, au moins, on renoue avec une tradition, avec une fête des morts. Car le royaume des fées, c'est aussi le royaume des morts, de l'éternelle beauté, le royaume souterrain... Mais regardez nos cimetières: ce sont des parkings! Les tombes ressemblent à des carrosseries de voiture, toutes alignées. Je ne veux pas voir une seule herbe! Quelle tristesse... Oui, il faut retrouver ces petites fêtes, ce sont nos parts d'imaginaire.
Et apprendre à rester enfant?
Le conte de fées n'est pas fait pour endormir les enfants, mais pour réveiller les adultes! Il ne s'agit pas de s'enfermer dans l'enfance, comme Peter Pan, mais de cultiver ce qu'il y a de meilleur en elle, pour devenir un être humain libre. L'enfant est libre, il a le chemin des oiseaux. Il s'émerveille... C'est terrible de ne plus s'émerveiller. Regardez ces cités sans rêve, avec ces adultes de 12 ans qui ne s'émerveillent plus. On le sait bien, ce n'est pas l'absence de sommeil qui tue, mais l'absence de rêve... Moi, je pense qu'il y a un Robin des bois, un Petit Poucet, un Long John Silver, un Achab qui sommeille en nous, dans l'enfant qui est en nous. Il faut rendre aux contes leur magie, leur esprit de rébellion. "L'imagination, c'est la vie!" disait Gaston Bachelard. Il a raison: l'imagination est vitale. Il faut laisser aux enfants et aux adultes la liberté d'entendre leur voix intérieure, "les mots bruyants et familiers qui s'en vont comme les oiseaux dans une aire", disait Victor Hugo. Il faut leur permettre d'imaginer le monde.
Le conte de fées n'est pas fait pour endormir les enfants, mais pour réveiller les adultes! Il ne s'agit pas de s'enfermer dans l'enfance, comme Peter Pan, mais de cultiver ce qu'il y a de meilleur en elle, pour devenir un être humain libre. L'enfant est libre, il a le chemin des oiseaux. Il s'émerveille... C'est terrible de ne plus s'émerveiller. Regardez ces cités sans rêve, avec ces adultes de 12 ans qui ne s'émerveillent plus. On le sait bien, ce n'est pas l'absence de sommeil qui tue, mais l'absence de rêve... Moi, je pense qu'il y a un Robin des bois, un Petit Poucet, un Long John Silver, un Achab qui sommeille en nous, dans l'enfant qui est en nous. Il faut rendre aux contes leur magie, leur esprit de rébellion. "L'imagination, c'est la vie!" disait Gaston Bachelard. Il a raison: l'imagination est vitale. Il faut laisser aux enfants et aux adultes la liberté d'entendre leur voix intérieure, "les mots bruyants et familiers qui s'en vont comme les oiseaux dans une aire", disait Victor Hugo. Il faut leur permettre d'imaginer le monde.
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